Soumis par Claude Maccari le mar 21/09/2021 - 17:14
plateau de Beauregard

Réduire la croissance de la population pour limiter les besoins en eau potable

Le déficit potentiel en eau potable à l’horizon 2040 sur La Clusaz est caractérisé, compte tenu des hypothèses de croissance démographique validées par les élus. En effet, La Clusaz envisage de passer de 24 000 lits (situation 2019) à 29 740 en 2040 (cf schéma directeur du petit cycle de l’eau réalisé en 2019 par O des Aravis). Soit + 25 % de lits en 20 ans !!

Cette fuite en avant ne peut que mettre en péril notre territoire. Nous vivons dans un espace fini, le développement ne peut donc pas être infini. Partant de ce constat, nous devons inscrire l’avenir de notre territoire dans une logique d’économie, de sobriété, d'équilibre. Pour preuve, aujourd’hui les axes routiers sont déjà plus que saturés. La communauté de communes des vallées de Thônes consciente de ce problème est en train d’engager des actions pour atténuer cette saturation. Alors si La Clusaz reste sur sa trajectoire de + 25 % de lits, oui les efforts d’aujourd’hui resteront vains et le territoire des vallées de Thônes en pâtira.

Les besoins en eau potable selon les stations des Aravis

Contrairement à La Clusaz, les communes du Grand-Bornand et de Saint Jean de Sixt avec les mêmes hypothèses de croissance démographique, seront en excédent d’eau à l’horizon 2040.

Le schéma directeur du petit cycle de l’eau réalisé en 2019 par O des Aravis précise :

- en hiver, le besoin de La Clusaz va passer à 3 450 m³/j d’eau potable en 2040 (page 208 rapport phase 2). Il pourrait y avoir un déficit de 37 000 m³ sur 43 jours (page 212 rapport phase 2).

- en été, le besoin de La Clusaz va passer à 2 500 m³/j d’eau potable en 2040 (page 208 rapport phase 2). Il pourrait y avoir un déficit de 16 000 m³ sur deux mois (page 212 phase 2).

- en hiver, le besoin du Grand Bornand sera de 3 136 m³/j en 2040 : ressource excédentaire a minima de 30 % (page 216 rapport phase 2).

- en été, le besoin du Grand Bornand sera de 2 400 m³/j en 2040 : ressource excédentaire a minima de 65 % (page 216 rapport phase 2).

Dès lors, il est légitime de s’interroger sur l’excédent du Grand Bornand à l’horizon 2040, qui est suffisant pour "combler" le déficit de La Clusaz. Aussi, pourquoi n’est-il pas envisagé une connexion entre Le Grand Bornand/Saint Jean de Sixt et La Clusaz pour être en capacité d’amortir le déficit potentiel de La Clusaz à l’horizon 2040 (Le Grand Bornand est déjà connecté avec Saint Jean de Sixt). Et ce d’autant plus que la CCVT va, à l’horizon 2026, détenir la compétence "eau potable" sur l’ensemble de son territoire .

De plus, ce même schéma directeur du petit cycle de l’eau réalisé en 2019 par O des Aravis précise dans sa synthèse page 73 phase 3 que le déficit potentiel de La Clusaz est avéré en 2040, mais sans avoir pris en compte le stockage que constitue la nappe du Fernuy. Pourquoi avoir fait l’impasse  sur cette nappe du Fernuy ?

Enfin, il faut noter qu’un projet territorial de gestion de l’eau (PTGE), cité à plusieurs reprises dans le dossier, est en cours d’élaboration à l’échelle du territoire. Compte tenu de cet élément, du transfert de compétences de la compétence "eau" à la CCVT au plus tard en 2026, il est urgent d’attendre et de se saisir des conclusions de ce PTGE avant tout nouvel investissement significatif dans le domaine de l’eau.

Les solutions alternatives "eau potable" présentes sur le territoire de la Clusaz

Le dossier, à plusieurs reprises, précise qu’en 2018, ce sont près de 100 000 m3 d’eau de la retenue de Lachat qui avaient été réservés de manière préventive et dérogatoire pour l’alimentation en eau potable du village, sous réserve bien sûr de mettre en place un système de potabilisation de l’eau.

Cela démontre bien que l’on peut, avec des adaptations/modifications (mise aux normes, station de traitement, modification des réseaux pour répondre aux normes d'eau potable) utiliser l’eau des retenues existantes pour l’eau potable. Alors oui, la conversion en eau potable des retenues qui sont en " eau"  aux périodes d’étiages est possible (retenue de la Fériaz 44 000 m³, retenue du Crêt du Merle 27 000 m3 ).

Pour mémoire les différentes retenues actuelles sont alimentées soit par la prise d’eau du Patton, du ruisseau des Prises (à construire) et de la Gonnière. Il existe donc bien des solutions alternatives pour répondre à l’enjeu vital d’eau potable.

Neige de culture et transition

Le maître d’ouvrage annonce à plusieurs reprises dans le dossier «qu’investir dans la neige de culture a pour vocation de faire perdurer l’exploitation du domaine skiable sur les années à venir. Le maintien du système économique actuel permet ainsi d’investir sereinement dans les projets de diversification sur les 20 prochaines années et amorcer la transition climatique. Des projets de diversification touristique 4 saisons sont d’ailleurs déjà initiés par la collectivité». Nous nous interrogeons sur cette annonce. Pourquoi ne pas assurer dès aujourd’hui cette transition (alternative au "tout ski" avec le développement du tourisme 4 saisons) et mettre en place une stratégie de développement fondée sur d’autres piliers que la seule neige de culture à toutes altitudes ?

Et ce d’autant plus que le dossier cite à plusieurs reprises l’année 2020 qui "restera comme la meilleure saison en termes d’activité économique jamais réalisée".

Autre interrogation : le dossier de demande d’autorisation environnementale précise page 92 que les nouvelles surfaces enneigées grâce à la retenue de la Colombière permettront d’atteindre un taux de couverture optimum du domaine skiable. Il est alors surprenant de lire dans le dossier un courrier de la SPL O des Aravis adressé à M.le Préfet qui mentionne un projet d’extension à l’horizon 2024 de la retenue de l’Etale située sur le domaine skiable de La Clusaz (passage de 55 000 m³ à 70 000 m³).

La course à l’enneigement de culture ne semble donc pas s’arrêter avec la retenue de la Colombière. N’y a-t-il pas là une contradiction avec les intentions d’amorce de transition annoncées ?

Par ailleurs, notons que sur les 33 ha enneigés avec cette retenue, 18 % sont localisés à des altitudes inférieures à 1 500 mètres et 9 % entre 1 500 et 1 600 mètres.

Nous nous questionnons fortement sur l’enneigement artificiel à des altitudes inférieures à 1 500 mètres. En effet, l’ensemble des données météorologiques disponibles indique que les effets du changement climatique sont bien plus significatifs à des altitudes inférieures à 1500 mètres qu’au-dessus. Il est donc absurde de vouloir développer de la neige de culture sur ces surfaces. Partant de ce constat, il serait sensé d’envisager pour l’avenir le retour skieurs en remontées mécaniques plutôt que d'installer des canons à neige consommateurs d'eau.

C’est bien en changeant de point de vue sur l’enneigement à ces altitudes et en s’engageant sur des décisions d’un autre type que la transition climatique annoncée dans ce dossier pourrait réellement s’amorcer. Enfin, notons que le dossier explique bien que les retenues de l’Étale et du Lachat ont un potentiel d’extension, soit + 35 000 m³ pour les deux retenues.

Sensibilité environnementale du site

Tous les scientifiques (géologues, hydrologues, botanistes...) s’accordent à dire que la sensibilité environnementale du site de la Colombière est très forte : espèces protégées, habitats d’espèces protégées, habitats d’intérêt communautaire. En effet, et ce malgré les mesures compensatoires proposées, ce projet porte une atteinte irréversible aux milieux naturels.

En exemple, voici les conclusions relevées dans le dossier sur l’interaction Tourbière de Beauregard/Retenue de la Colombière qui laissent à penser que l’absence d’impact ne peut être formellement garantie : "Ainsi à ce jour, avec les données que nous avons, le projet ne génère pas d’impact sur la tourbière." (page 476)

"Un point bas (1 531 mètres) au nord-est de la zone d'emprise du projet peut être une zone d'infiltration potentielle, contribuant par le biais de la fissuration affectant les terrains du substratum, à l'alimentation de la tourbière située 20 mètres environ en contre-bas. La confirmation ou l'infirmation de cette possibilité pourront être apportées par la réalisation d'un forage de reconnaissance atteignant une côte inférieure au niveau piézométrique observé dans la tourbière."(page 1 286)

Donc oui, nous pensons qu’il y a lieu de rechercher d'autres solutions alternatives.

Coût

Sur ce point le dossier comporte plusieurs imprécisions, des manquements. Dès lors la caractérisation "d’utilité publique" n’est pas fondée.

Cette caractérisation est sollicitée au titre de l’usage mixte de la retenue : eau potable + neige de culture.

Page 975/2272 le dossier de DAE précise que les échéances de construction relative à l’eau potable restent à définir.

Puis, page 1876/2272 du dossier, partie autorisation loi sur l’eau, les chiffres sont différents de ceux mentionnés dans le début du dossier. O des Aravis est absente…..

Ces imprécisions, ces manquements démontrent que le projet de la retenue d’altitude a pour objectif, avant toutes choses, l’enneigement artificiel. L’alimentation en eau potable apparaît comme un prétexte, pour se présenter comme relevant d’utilité publique.

Compte tenu de l'ensemble des éléments ci-dessus, le collectif Pour une Transition Participative à Thônes émet un avis défavorable au projet d'aménagement de la retenue de la Colombière.

Vincent Boneu

 

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